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Bendy Casimir : briser les tabous

Par Frank Curreri - Et Bendy Casimir, citoyen français, imagine le jour où ses compatriotes désapprobateurs le croiront enfin. Pour le moment, ce combattant professionnel demeure une sorte de paria malgré lui dans son propre pays, à cause de son choix de carrière impopulaire et en grande majorité incompris.

Par Frank Curreri

Le MMA est un sport.

Et Bendy Casimir, citoyen français, imagine le jour où ses compatriotes désapprobateurs le croiront enfin. Pour le moment, ce combattant professionnel demeure une sorte de paria malgré lui dans son propre pays, à cause de son choix de carrière impopulaire et en grande majorité incompris.

Annoncer aux gens en France que vous pratiquez des arts martiaux mélangés est loin de vous valoir le respect immédiat. Le plus pur de tous les sports est en fait interdit en France. Aux antipodes de la Grande-Bretagne voisine, les fans de MMA  en France ne parlent généralement pas de leur passion, de peur qu’on mette en doute leur santé mentale. En fait, très peu de gens en France connaissent la signification des initiales ‘MMA’, et on risquerait de vous regarder avec de grands yeux ronds si vous leur demandiez ce qu’est l’UFC.

“Il y a sûrement 80 % des Français qui n’aiment pas le MMA. Ils assimilent ça à du combat de rue, sans aucune règle. Ils ne voient pas ça comme un sport”, a expliqué Casimir à notre traducteur, étant donné qu’il parle très peu l’anglais. “Sur les 20 % qui aiment ce sport, la plupart d’entre eux ont peur de l’admettre en public.”

Réputée pour son architecture raffinée, sa grande cuisine et sa mode avant-gardiste, la France n’a rien du lieu idéal pour un pratiquant des arts martiaux mélangés qui aspire à devenir un champion. Il n’y a pas de cage où s’entraîner, un inconvénient majeur quand on sait que les deux plus grosses organisations du monde, l’UFC et son organisation jumelle la WEC , organisent des combats dans des cages octogonales, et que mettre en place une stratégie qui prend en compte les dimensions très précises de ces cages peut faire la différence entre un vainqueur et un vaincu.

Au vu de la pénurie de champions MMA en France, et du manque flagrant de lieux pour s’entraîner, la liste de pratiquants d’arts martiaux mélangés que l’on retrouve sur la scène internationale est extrêmement réduite : Cheick Kongo, le prétendant dans la catégorie poids lourd UFC  est bien seul. Derrière lui, on retrouve le poids léger très prometteur, David Baron (14-3). (Il faut d’ailleurs noter que Kongo et un ancien combattant UFC, Jess Liaudin, ont beaucoup pratiqué le MMA en Grande-Bretagne). Comme Kongo et Baron, Casimir (19-5-2) n’essaie pas de se faire un nom. A la demande expresse de Ferrid Kheder, ancien judoka ayant participé aux jeux Olympiques et ancien combattant MMA (16-5), Casimir s’entraîne depuis ces derniers mois au centre TapOuT de Las Vegas sous la direction de Shawn Tompkins et Keebo Robinson.

Le 6 mars prochain, le poids léger français devrait faire ses débuts en WEC face à Ricardo Lamas (7-1), un ancien lutteur à l’université réputé pour ses frappes solides et de plus en plus percutantes. Compte tenu du bilan des deux combattants, il semblerait logique que Casimir mette rapidement au sol Lamas, avant de faire prévaloir sa supériorité au jiu-jitsu. Mais aucun combattant n’a pour l’instant été en mesure de mettre Lamas à terre, pas même Danny Castillo, un ancien lutteur à l’université qui s’entraîne avec Urijah Faber  et une équipe de lutteurs expérimentés.

“Il a l’air d’être un bon combattant”, a déclaré Casimir. “C’est un lutteur. Un combat, c’est un combat. Tout peut arriver. Mon équipe et moi allons réfléchir et élaborer une stratégie contre lui, sinon, je vais m’entraîner dur pour être prêt à tout.”

La France produit depuis des décennies quelques-uns des meilleurs judokas au monde (ce qui la place au 2e rang mondial juste derrière le Japon). Pourtant Casimir n’a pas été formé à l’école du judo, ce qui est d’autant plus surprenant quand on le regarde combattre. Il pratique le jiu-jitsu brésilien depuis environ huit ans, et combat sur le circuit européen. Naturellement très athlétique et doté de biceps impressionnants, il s’avère expérimenté et redoutable au sol, et possède une large palette de soumissions incluant toute sorte de clés de genoux, de clés de jambes et d’étranglements (A noter : il a obtenu 12 victoires sur 19 par soumission). Tous les combats de Casimir se sont déroulés en Europe, en Russie ou au Japon. Mais le test ultime pour faire prévaloir ses qualités se fera en WEC, quand Casimir devra montrer qu’il a plus d’un tour dans son sac face à une sélection de poids légers hors pair.

Tout laisse à penser que Casimir, 28 ans, est rapidement en train de maîtriser le combat debout. Une histoire en provenance du centre TapouT semble en être l’illustration parfaite. Un jour Tompkins a montré à Casimir un enchaînement coup de poing/coup de pied. Plus tard à l’entraînement le même jour, Casimir a utilisé le même enchaînement face à un pro expérimenté, mettant son sparring partner K-O à l’aide d’un high kick.

Ce ne fut pas le seul K-O lors de ces séances d’entraînement intenses.

“C’est vrai qu’on s’entraîne dur”, a déclaré Kheder. “On s’entraîne toujours dur. Si on s’entraîne dur tous les jours, ça rend le combat facile. On s’entraîne au moins trois fois par semaine, en reproduisant les mêmes conditions qu’un vrai combat. Bien sûr, on essaie de ne pas se blesser, de ne pas se couper et de ne pas utiliser les coudes. Mais souvent, si on arrive à mettre K-O le type en face, (le sparring partner), on le fait, car on a besoin de travailler notre défense, pour ne pas être mis K-O. Ça peut arriver pendant un combat et il faut être prêt à recevoir de sacrés coups de poing, et je trouve que c’est la meilleure façon de se préparer pour le grand combat, en se préparant au pire. Et c’est vrai qu’il y a des surprises.”

Et personne n’est plus surpris que la mère de Casimir, qui, il y a quelques années, a découvert grandeur nature ce que faisait son fils, ce que jusque-là elle n’arrivait pas à comprendre.

“C’est incroyable que mon fils fasse ce sport !”, a-t-elle déclaré. “Et moi qui croyais que tu étais si sage et si calme.”

“Oui, mais j’en ai besoin pour me sentir bien”, lui a-t-il répondu.

“D’accord, si c’est ce que tu veux, fais-le. Mais je ne veux pas que tu sois violent en dehors de la cage.

Si tu veux pratiquer un sport comme ça, tu dois être raisonnable.”

Et c’est le cas. Casimir est allé à l’université en France pendant deux ans, avant d’abandonner.

“Je ne voulais pas être prof”, a-t-il expliqué. “Je voulais juste être un sportif.”

La famille de Casimir a quitté Haïti pour la France il y a plusieurs dizaines d’années et s’est installée dans la banlieue parisienne. Le gigantesque tremblement de terre qui a récemment dévasté Haïti et a fait tant de victimes préoccupe Casimir.

“Je ne suis allé qu’une fois en Haïti, mais je me sens haïtien, car ma famille vient de là-bas”, a-t-il dit. “On a beaucoup de famille là-bas que mes parents connaissent. Ça me touche à travers mes parents.”

Homme discret et peu bavard, Casimir compte parmi ses modèles Ghandi.

“C’est un modèle pour moi, car, sans recourir à la violence, il a réussi à obtenir l’indépendance pour son pays”, a déclaré Casimir. “Pour moi, c’est la preuve que sans violence on peut obtenir ce qu’on veut, à condition d’être intelligent. C’est incroyable, car généralement, les gens (les pays) n’arrivent pas à faire changer les choses sans violence.”